For the season 2009-2010, the SpaceKraft Pompadour is
flying into the galaxy the pleasure is mine, class of the École
Nationale Supérieure des beaux-Arts de Lyon.
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The Pleasure is Mine : Autour de cette formule de politesse, nous tâchons, dans l'exercice de nos différentes pratiques artistiques, de nous faire plaisir tout en faisant plaisir aux autres. En disant the pleasure is mine, dans un échange de bons procédés, nous disons surtout  it's a pleasure to please you.
Je veux te faire plaisir, versus Je veux te plaire. Que chacun
d'entre nous à un moment donné puisse s'écrier :
«it blows my mind away!». Flirtons avec l'entertainment
pour mieux en découdre, laissons la pluie rouler sur nos
torses velus
, fixons des objectifs difficiles à attendre. On
nous traitera de populiste et nous rétorquerons que le
mépris de la masse est l'enfant honteux des tyrannies
du siècle dernier, et qu'en cela il ne nous intéresse pas,
pas plus que nous intéresse d'ailleurs l'idée de plaire à tout
le monde. Travaillons avec gaieté de coeur, et contemplons
tout à loisir les oeuvres de nos collègues, de nos aînés,
de nos soit-disants ennemis. Nous ne cherchons pas à
faire date. À faire oeuvre, peut-être, quoi que. À faire sens,
si nous en sommes capable, on verra bien. Nous n'avons
pas à faire mieux, nous n'avons même pas à trouver
notre voix propre, dans un soucis exacerbé de «spéciosité
».
Même Divine se retrouva un jour au MOMA. Interrogeons
les bonnes manières et les autres manières, puisqu'il y a
l'art et la manière de faire. Produisons, dans la post-production,
certes, puisque telle est la figure imposées par l'époque,
mais aussi dans la production simple et attentive, sans les
fioritures et gimmicks de la «maison de production»
— en ce domaine, de toute façon le premier magazine
branché fera certainement mieux que nous.
Si il existe un lieu ou cette réappropriation des moyens de
productions peut encore se faire, c'est bien celui d'une école
d'art : une production à notre échelle (nous sommes tenté
de dire à échelle humaine) bien qu'ambitieuse, un artisanat
malicieux de formes et de sens, à cheval (le cul entre deux
chaises?!) entre les options art et design, entre le virtuel
et le réel, entre le privé et le public. Faisons les choses
avec grâce et panache, abordons le collectif avec une
joie rageuse, comme des pirates abordant leur île refuge
pleine des trésors ravis aux navires marchants, ou plutôt
comme des corsaires soutenus par l'autorité lointaine de
notre vaisseau mère l'école.

Embarquement immédiat.



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The Pleasure is Mine: keeping this strange polite statement
in mind, we will attempt to please ourselves pleasing others,
in all our different artistic practices. We say : «the pleasure
is mine», to say «it's a pleasure to please you». «Your
pleasure pleases me». Each of us, at some point, should
be able to shout : «it blows my mind away!». Let's flirt with
the entertainment to fight it better, let the rain flow on our
villous chests, let's assign some ambitious goal difficult to
reach. If how aim is to please, then probably some people
will call us «populist», then we will answer back that the
scorn on the masses doesn't interest us, neither the idea
to please the all world. Let's work with cheerfulness.
Let's behold with leisure the art of our colleagues, seniors,
so-called enemies. We don't try to make a mark in history,
perhaps to make art, we will see. Or to make sense, if we
are able to, who knows. We don't have to find our
«special thing». There is no special thing anymore. We
don't have to be «better», we don't have to find our own
voice. We don't have to chock : even Divine ended
one day in museum. Let's look at all «the manners» to
do art. Let's produce, as a post-production, indeed, since
it has been the way prescribed by our time, but not only:
we can also produce without the gimmicks and chichis
of production compagnies. Anyway, in this domain, the
first hipster magazine will do it better than us. And if it
still existing a place where we should try to re-appropriate
all this production devices, this place should be the
art school. A production at our scale (or should we say
at human scale?) but challenging, a shrewd art craft
of forms and senses in between art and design, in
between real and virtual, in between private and public
space. Let's make things with Grace and Panache,
let's accost the collective with a fierce joy, just like pirates
finally arriving to their secret island, full of the treasures
they had robbed from the merchant ships, or even
more like corsairs sustained by the faraway authority
of our king vessel, the school.

welcome on board.

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notes et commentaires :

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* Pour reprendre une image de Lawrence chère à Gilles Deleuze et Felix Guattari, l'artiste ou le poète trouant le parapluie tissé de conventions et d'opinions qui nous protège du chaos environnant :
« dans un texte violemment poétique, Lawrence décrit ce que fait la poésie : les hommes ne cessent pas de fabriquer une ombrelle qui les abrite, sur le dessous de laquelle ils tracent un firmament et écrivent leurs conventions, leurs opinions ; mais le poète, l'artiste pratique une fente dans l'ombrelle, il déchire même le firmament, pour faire passer un peu du chaos libre et venteux et cadrer dans une brusque lumière une vision qui apparaît à travers la fente (...). Alors suivent la foule des imitateurs qui ravaudent l'ombrelle avec une pièce qui ressemble vaguement à la vision, et la foule des glossateurs qui remplissent la fente avec des opinions : communication. Il faudra toujours d'autres artistes pour faire d'autres fentes, opérer les destructions nécessaires, peut-être de plus en plus grandes, et redonner ainsi à leurs prédécesseurs l'incommunicable nouveauté qu'on ne savait plus voir. C'est à dire que l'artiste se bat moins contre le chaos (qu'il appelle de tous ses vœux d'une certaine manière) que contre les « clichés » de l'opinion. Le peintre ne peint pas sur une toile vierge, ni l'écrivain n'écrit sur une page blanche, mais la page ou la toile sont déjà tellement couvertes de clichés préexistants, préétablis, qu'il faut d'abord effacer, nettoyer, laminer, même déchiqueter pour faire passer un courant d'air issu du chaos qui nous apporte la vision. (...) L'art lutte effectivement avec le chaos, mais pour y faire surgir une vision qui illumine un instant, une Sensation. (...) Une œuvre de chaos n'est certe pas meilleure qu'une œuvre d'opinion, l'art n'est pas plus fait de chaos que d'opinion ; mais s'il se bat contre le chaos, c'est pour lui emprunter les armes qu'il retourne contre l'opinion, pour mieux la vaincre avec des armes éprouvées. C'est même parce que le tableau est recouvert de clichés que le peintre doit affronter le chaos et hâter les destructions, pour produire une sensation qui défie toute opinion, tout cliché (combien de temps?). L'art n'est pas le chaos, mais une composition du chaos qui donne la vision ou sensation, si bien qu'il constitue un chaosmos, comme dit Joyce, un chaos composé — non pas prévu ou préconçu.»

Gilles Deleuze et Félix Guattari, qu'est ce que la philosophie?, édition de minuit, 1991.

Savoir reconnaître dans ce «geste qui perce» un moment de vérité constitue la base de l'éthique telle qu'elle est nommée par Alain Badiou dans l'éthique : essai sur la conscience du mal, édition Nous, 2003.

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* J'entends donner à ce néologisme encore un autre sens que celui du dictionnaire : spéciosité comme la volonté d'être spécial à tout prix, l'attitude affectée qui consisterait à ne vouloir s'imaginer artiste qu'en trouvant sa marque absolument singulière, en somme une préciosité de la spécialité. La spéciosité questionne le style, la tendance au «so special» (lire à ce sujet le premier chapitre de hello I am special, Hal Niedzviecki, city lights, 2006), ainsi que la place de l'auteur dans la fabrication de l'œuvre, le moi moi moi qu'il faudrait à tous les coups crier tout bas.

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* Le travesti Divine fut l'acteur fétiche de John Waters, cinéaste américain de l'outrance, grand représentant du film underground trash dans les années 70, célébré pour ses films Pink Flamingos (dans lequel Divine mange une crotte de caniche) et Female Trouble.

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* Nicolas Bourriaud  décrit très justement la question  de l'appropriation des données existantes dans la création contemporaine :
« La question artistique n’est plus : “que faire de nouveau ?” mais plutôt :  “que faire avec?” Autrement dit : comment produire de la singularité, comment élaborer du sens à partir de cette masse chaotique d’objets, de noms propres et de références qui constituent notre quotidien ? »
postproduction, les presses du réel, 2004.

Cependant, on peut aussi émettre des doutes quant à l'opacité de cette même masse :
« La pensée elle-même se délite : on compile tout, on voit tout, on sait tout, et, pourtant, on ne comprend plus rien. »
la tyrannie technologique, collectif d'auteurs, édition l'échappée, 2006.

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* Les corsaires pillaient les vaisseaux ennemis avec l'autorisation de leur gouvernement, l'iconographie pittoresque stipulant qu'ils respectaient les vies et les biens personnels. Ils obéissaient aux lois de la guerre, sans être pour autant soumis à l'autorité d'un état major, sorte de marins civils armés indépendants, bien que ratachés à une couronne. Le butin se répartissait entre le roi, l'armateur, et l'équipage.

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